9h30

S’habiller à l’étage.
Descendre avec une brassée de torchons propres dans les mains. Ce seront nos essuie-tout de la journée.
Se laver les mains.
Pour le moment, je travaille avec Karim, je le seconde sur les pâtisseries. Chaque jour, on fait 3 ou 4 gâteaux différents, selon les commandes de la veille, un peu plus le mercredi, 1er jour de la semaine où il faut tout refaire évidemment !
Fondant à l’orange (imbibé de jus d’orange), quatre-quarts à la farine d’avoine (sans farine de blé), mousse au chocolat (sans jaunes), gâteau au chocolat (sans farine !), tiramisu aux petits beurres nantais, cerises pochées, riz au lait à la cardamone, qui cuit doucement toute la matinée sur le coin du fourneau, crème catalane, panna cotta sur lit de compote de rhubarbe…
Enfourner les gâteaux, surveiller le niveau de cuisson, ranger dans la chambre froide les produits frais.
Puis on attaque certaines préparations de légumes, qui demandent plus de main-d’œuvre, et que les autres cuisiniers ne pourront pas entièrement faire : écosser les petits pois, arracher le pied de l’artichaut cru, effeuiller l’artichaut cuit, enlever les cotes des épinards, chénopode et arroche, nettoyer les radis, ciseler les oignons…
Une tâche quotidienne en ce moment c’est l’émiettage de la chair d’araignée (c’est la saison !) : casser les pattes, en vider la chair (et des corps), séparer la chair des éventuels restes de cartilage et de carapace
Démarrer la mise en place du service, pour les entrées par exemple : brunoise de mangue (ou de fraise), quartiers de citron (qui sont en fait coupés en 6), chiffonnade de salade

11h45

Déjeuner de l’équipe : œufs et pâtes le 1er jour de la semaine, une vraie préparation de poisson, de merguez… les autres jours, des préparations destinées à la clientèle au moment de la mise au point des recettes ou s’il en reste parfois.
On mange sur la terrasse dehors dès que le temps le permet, dans la salle de réunion à l’étage sinon.

12h15

Les 1ers clients arrivent.
On finit la mise en place des postes entrées, plat principal et dessert.
Pour le moment, je suis aux entrées, avec Karim ou Antoine.
On place sur le plan des récipients contenant les préparations qui supportent d’être hors du frigo pendant la durée du service : courgettes cuisinées, bettes cuisinées, quartiers de citrons, salade, fleurs et pétales ; et dans le frigo juste dessous les préparations plus fragiles : mangue assaisonnée, terrine de poisson, chair d’araignée, saumon fumé, langoustines…
On fait le point sur le contenu du jour des entrées : « on met des langoustines avec les bettes aujourd’hui, mais j’ai du saumon fumé si des clients n’en veulent pas ».
1ère commande :
Arnaud, Karim ou Nathan entrent en cuisine : « j’annonce 2 menus à 42 euros, 2 armor. A suivre, une lotte et un agneau »
« Armor » c’est le petit nom pour la cuisine de ce qui s’appelle « douceurs d’Armor et d’Argoat » sur le menu. A chaque table, il aura été présenté le contenu de cette entrée, pour guider le choix des convives. Et c’est pourquoi ils nous précisent parfois : « remplacer les langoustines par du saumon », « sans araignée »…
Attraper 2 assiettes à entrées et démarrer le dressage, d’abord tout ce qui n’est déjà plus au frais : courgettes dans un emporte-pièce ovale, quenelle de mangue, quenelle de bettes, à la cuiller, persil plat haché sur les bettes, cordon de salade assaisonnée sur le haut de l’assiette, une fleur en déco ou des pétales, selon l’inspiration.
La porte de la cuisine s’ouvre à nouveau, 3 entrées supplémentaires demandées, on n’attend pas de finir les 2 premières pour les attaquer mais on va faire en même temps les 5 demandées.
On place les assiettes sur le passe.
entrée armor
Dès qu’une série est terminée, un petit coup frappé sur la porte pour avertir les serveurs et un petit coup de propre sur le plan et on attend les commandes supplémentaires en reprenant une préparation préliminaire qui peut s’interrompre facilement : détacher les feuilles d’artichaut des cœurs, refaire de l’avance de brunoise de mangue…
On gère la vaisselle également, au retour des assiettes de la salle. Les assiettes sont très chaudes au sortir de la machine, on les sépare donc des assiettes froides qui serviront aux prochaines commandes d’entrées ou de desserts.

13h30

Les dernières entrées sont envoyées. On range chaque ingrédient dans des récipients hermétiques, les végétaux restent en petite quantité dans le frigo sous le plan, les poissons repartent dans le frigo à poisson. On démarre le nettoyage complet du plan et on va pouvoir donner ponctuellement un coup de main au dressage des plats, à l’appel notamment de Nathalie : « crêpe sur la lotte ». Il s’agit d’une portion de crêpe de la forme d’une voile, croustillante après un passage au four, elle vient en déco sur l’assiette, donner du volume.

Nettoyage
Plonge
Nettoyage

15h

Fin de la matinée.
On prend souvent un verre d’eau, un verre de sirop, un café (une cigarette), ensemble sur le trottoir avant de se quitter pour l’après-midi. 10 minutes de marche et je suis dans mon petit studio d’appoint.
S’il faisait beau, j’irais à la plage.
Souvent, je m’allonge et je dors un peu après avoir pris le temps de noter les trucs faits, appris, goûtés ce jour-là. Dire que je pensais avoir une grosse résistance physique ! En fait, il me faut du temps pour me faire à ce nouveau rythme ! Parce que ça change sur la journée mais ça change aussi sur la semaine : difficile de se sentir en week-end les lundis et mardis, je les passe un peu trop à faire autre chose que me reposer et me voilà donc un peu fatiguée dès le démarrage de la semaine !
Mardi dernier, j’ai ainsi préféré passé ma soirée à aller participer à un cours de cuisine donné par Nathalie Beauvais (au Hangar à Ploermel) plutôt que de penser à autre chose qu’à la cuisine !

19h15

Toute l’équipe arrive un peu en avance, pour avoir le temps de se mettre en place tranquillement.
On sort les boites, les cassolettes, les planches à découper, les pommes, les couteaux, les torchons, les emporte-pièces, on refait les niveaux des différentes préparations dont on aura besoin pendant la soirée.
Les 1ers clients arrivent et c’est le même ballet que le midi qui démarre.
Entrée d’un serveur dans la cuisine, annonce d’un bon, auquel on répond par un « oui » franc et massif pour bien montrer qu’on a enregistré la commande. Tendre les bras pour attraper sur les étagères en hauteur le bon nombre d’assiettes, placer les emporte-pièces sur les assiettes, et la danse du placement des différentes ingrédients sur chaque assiette commence. Il faut bien imaginer l’indispensable coordination des mouvements entre les 2 personnes qui composent simultanément les assiettes dans un espace exigu, où l’on va se croiser, se baisser, croiser les cuillères (de bettes, de courgettes, de mangue) et les flacons (de vinaigrette maison ou d’huile d’olive citron), se retourner (pour attraper les herbes coupées), une bonne dizaine de fois pour chaque commande.
De la même façon qu’à midi, on enchaîne les commandes et puis c’est le ménage, un peu plus insistant sur le sol le soir.

23h

Fin du rangement.
« Qui veut un verre d’eau ? » « moi » « moi » « moi » « … »%. C'est qu'il fait chaud en cuisine ! Ici on dit pour rire que les "jeunes" de l'équipe prennent du sirop dans leur verre alors que les "vieux" prennent seulement de l'eau. De quoi cataloguer gentiment les nouveaux arrivants !
Il n’y a plus qu’à se changer, retrouver ses habits civils, jeter le tablier au sale, et souvent on traine aussi un peu sur le trottoir devant le restaurant avant de rentrer.
Avant de se coucher, rallumer l’ordinateur et encore noter les tâches accomplies pendant la soirée. Je ne veux rien oublier !
Et la journée a filé à une vitesse…